Le Dniepr, un fleuve d’où s'écoule l'Histoire
Le Dniepr. Cet immense cours d'eau sillonne les marges orientales de l'Europe. Il a façonné tout autant le paysage que l'Histoire des Hommes vivants sur ses rivages, tel un creuset bouillonnant d'où émergerait la grandeur et la folie des hommes. Majestueux, le fleuve s'impose comme un des plus grands cours d'eau du continent, traçant une marque profonde et indélébile, à la hauteur de l'Histoire qu'il évoque et façonne.
Par sa longueur, il s'impose comme le 3e plus long fleuve d'Europe, courant sur près de 2300 kilomètres. Seules la Volga et le Danube lui ravissent les premières places. Son débit n'en fait pas un simple ruisselet insignifiant, il est équivalent à celui du Rhône, et dépasse celui de bien des grands fleuves d'Europe.
Voici le Dniepr qui nait dans les collines du Valdai. Ce n'est encore qu'un gros ruisseau qui dévale les pentes douces des moraines, mais déja il sait se rendre utile aux hommes : la ville de Valdai est réputé au XVIIIe siècle pour ses fonderies de cloches. Il abreuve depuis plus de 8 siècles les moines du monastère d'Iverski.
Il grossit à chaque rencontre avec un affluent, dont il se gorge du flux.
En courant vers le sud ouest, le jeune Dniepr arrose Smolensk, porte du grand duché de Moscovie convoité par tout les conquérants désireux de fondre sur Moscou, depuis le grand duché de Lituanie jusqu’à Hitler, sans oublier Napoléon Ier.
Les remparts de Smolensk :
Il borde les remparts de Orcha, ville millénaire et colonie protestante au milieu de ces terres orthodoxes. En septembre 1514, s'y déroula la bataille d'Orcha où s’affrontèrent les armées Lituaniennes et Polonaises opposées aux armées Russes.
Un crochet au sud, et le Dniepr entre à Mogilev, ville étape dont Napoléon s'empara et qui fut l’objectif des belligérants de la Grande Guerre du Nord.
Le Dniepr infléchit sa course, et file maintenant vers le sud, attiré par la Mer Noire qu'il n'arrivera à rejoindre que dans plus d'un millier de kilomètres. Sur sa route, il absorbe les eaux de la Bérézina, de terrible mémoire pour les Français. D'une victoire tactique remporté par les Grognards, l'Histoire en a fait l'étendard des pires désastres. Son flot emporte avec lui les débris des rêves de conquêtes d'un des plus grand conquérant de l'Histoire, et les charrie vers d'autres souvenirs de toutes époques, qui vont se fondre et se confondre dans les tourments de la vie des Hommes et des Empires.
Lorsque le Dniepr aborde l'Ukraine, le Dniepr est désormais un fleuve majeur. Nul ne peut lui contester sa force, ni renier son appartenance à l'Histoire, et pourtant il a encore tant d'évocations qui roulent dans ses eaux marécageuses.
Il vient abreuver la ville millénaire de Kiev. Combien des soldats qui s'entretuent en 1943 se doutent que l'une des racines de la Grande Russie a poussée ici même, avant de grandir et d'être absorbé par des entités formées plus à l'Est encore ? Dès le VIIe siècle, les princes Slaves avaient étendue leur emprise sur leur voisinage en imposant leurs tributs aux terres avoisinantes. Le varegue Oleg ne s'y trompa pas quand il en fit la conquête aux IXe siècle.
Oleg reçoit la soumission des seigneurs de Kiev :
Dans le creuset de cette principauté primitive se mêlèrent conquérants et commerçants scandinaves, aristocrates et paysans slaves, fondant la Rus de Kiev, dans laquelle l’orthodoxie chrétienne se répandit. L'exploitation de la route des Varegues aux Grecs, qui reliait Constantinople et l'ère méditerranéenne aux rivages de la Baltique en sillonnant les fleuves, favorisa le développement culturel de cette principauté. Le commerce accrue le territoire urbain, l'architecture s'enrichit de monuments et de monastère, et les ambassadeurs Rus' étaient reçus partout avec respect.
Telle était son prestige que le roi de France Henri Ier obtint en 1048 la main de la princesse Anne, fille du prince Iaroslav. Le déclin suivit peu de temps après et pourtant déja Kiev avait marqué de son empreinte les étendues orientales de l'Europe.
Iaroslav le Grand :
Sainte Sophie de Kiev, dont les origines remontent au XIe siècle :
Apres Kiev, le fleuve infléchit sa course vers le sud-est. Déja il aborde les confins septentrionals de l'immense plaine des Scythes, cette étendue immense dans laquelle l'identité de bien des peuplades nomades se sont forgées puis fondues. Grossit des eaux du Prypiat et de la Desna, il roule désormais sur des terres étales où son lit peut prendre ses aises et lui donner une largeur prodigieuse. ( De nos jours le réservoir de Krementchug à considérablement élargi le cours du fleuve).
Le Dniepr au sud de Kiev :
L'immense réservoir de Krementchug :
Sur ces terres au relief peu prononcé, il atteint Krementchug. L'histoire y fait un bond de quelques siècles, et nous fait rencontrer les marches méridionales de la Grande Pologne. Ici y fut batie, sur ordre de Sigismond II, une forteresse qui devait surveiller et contenir les Tatars.
Des Tatars :
Eloignons nous brièvement du grand fleuve. Vers l'est se trouve Poltava, où l'histoire laissa aussi son empreinte. Charles XII de Suede, lors de la Grande Guerre du Nord, fut contraint de s'éloigner toujours plus de ses bases, s’enfonçant loin en territoire hostile, cherchant désespérément de quoi nourrir et ravitailler son armée : l'Histoire venait de puiser ici les bases d'épisodes récurrents. C'est à Poltava que l'armée du Tsar Pierre Ier affronta le monarque Suédois. La bataille, qui se déroula en juillet 1709,consomma la défaite de Charles XII, et permit à la Russie d'étendre son influence sur les rives de la Baltique, mais aussi vers les grandes plaines d'Ukraine et de Pologne. Ce n'était qu'un épisode de plus dans la relation tumultueuse entre Orient et Occident....
Charles XII de Suede et son allié l'Hetmann cosaque Ivan Mazepa au soir de la bataille perdue...
En aval de Kiev, ce fleuve calme mais puissant devient le symbole de l'Ukraine naissante ou renaissante. Il a inspiré bien des poètes. Au XIXe siecle, Taras Chevtchenko devint le chantre de l'indépendance Ukrainienne. En bute a l'autoritarisme tasriste, il fut exilé sur ordre de Nicolas Ier en personne, qui lui interdit d'écrire ou de peindre pendant son exil.
Le Dniepr est ainsi dépeint par ce poète :
Rugit et gémit le vaste Dniepr
Furieusement hurle le vent
Il courbe les haut saules jusqu'à la terre
Lève des vagues pareilles à des montagnes
Et la lune blême a ce moment
Emerge ici ou la d'un nuage
Comme une barque dans une mer bleu sombre
qui tantôt se cabre et tantôt plonge
Les coqs n'ont pas encore chantés trois fois
Personne nulle part n'a fait de bruit
Les chouettes dans le bois se sont répondus
Et le frêne à grincé de temps à autre
Une illustration de ce poème peinte en 1941 par bouratchek :
Le grand fleuve, aux rives instables, arrive enfin à Dniepropetrovsk. Ici il embrasse avec force l'histoire soviétique. Auparavant la ville se nommait Ekaterinoslav, un nom donné par Grigori Potemkine, favori de Catherine II, en l'honneur de sa souveraine. Mais la révolution bolchevique va profondément modifier la société russe, n'épargnant pas même les noms des villes qui pourraient rappeler l'ancien régime honni par le nouveau maitre du Kremlin. Exemple et symbole, Grigory Petrovsky, éminent politique Bolchevique ukrainien, fut choisit pour accorder son nom à la grande ville industrielle. Un millénaire plus tôt, la ville était un carrefour commercial entre l'Occident et le monde musulman, s'ouvrant sur le pays d'Etelkoz. En Magyar cela signifiait "Pays entre les deux fleuves", l'autre fleuve étant, un peu plus à l'Est, le Dniestr.
Petchnegues, Coumans, Mongols, imposèrent tour a tour leur autorité sur la ville, avant que les Hetmanats cosaques ne s'y imposent au XVIIe siècle, en repoussant l'autorité polonaise. Mais les états sédentarisés supplantèrent rapidement les tribus nomades. Pris en étau entre le Khanat de Crimée et l'empire des Tsars, les cosaques finirent absorbés sans ménagement par la Russie.
Le fleuve roule désormais plein sud, et atteint Zaporo'je.
Cet endroit fut un lieu de passage du Dniepr depuis la préhistoire. Depuis l'antiquité, les Scythes y vécurent.
Tombes Scythes de l'ile Khortytsya :
Bien des siecles plus tard, les Varegues s'installèrent sur l'ile de Khortytsia.
Les Varegues remontent les fleuves russes :
Au XVIe siecle, les cosaques Zaporo'je y installèrent un camp militaire permanent, la Setch Zaporojskaia. Ils furent vaincus au XVIIIe siecle par l'armée de Caterine II qui en fit don à son favori Grigory Potemkine. Le fort l'Alexandrovsk fut fondé en 1770 sur la rive Est du Dniepr. Il faisait partie de la ligne de fortifications établies pour protéger les terres ukrainiennes des incursions tatares et turques. La ville fut rebaptisée Zaporo'je en 1921, un nom qui signifie "derrière les cataractes".
La Setch reconstituée :
Les Cosaques Zaporoje écrivent une lettre en réponse au sultan Mehmed IV de Turquie, selon Ilya Repine, XIXe siecle :
A cet endroit, le lit du fleuve se resserre, plusieurs rapides et des dizaines d'obstacles créent des rapides et des remous rendant la navigation hasardeuse. Dès le XIXe siècle, un projet existait pour ériger un barrage sur ce point du fleuve.
Aussi est-ce sans surprise que le premier grand chantier Stalinien prit naissance à cet endroit précis.
Tel l’œuvre d'un titan, une structure immense vit le jour lors d'un chantier pharaonique qui mobilisa par la force et par la terreur plus de 60.000 ouvriers. Le chantier débuta en 1927, sous la houlette des architectes soviétiques Viktor Vesnine et Nikolai Kolli, mais ils se firent aider par le Colonel Hugh Cooper qui avait à son actif le célèbre barrage Wilson sur la Tennessee.
Le barrage Wilson :
Quelle ironie et quel cynique mensonge le pouvoir soviétique affichait là : prétendant au bonheur des peuples et au progrès scientifique, le projet pris le nom de Dnieprogues, vitrine du savoir faire et de la puissance du nouvel état. Pourtant toutes les machines outils utilisées par les travaux, ainsi qu'une grande partie des installations électriques et des turbines furent d'origine américaines. Lors de sa mise en œuvre, le barrage éleva le cours du Dniepr de 37 mètres, noyant les rapides situés en amont, rendant le fleuve navigable loin au nord. L'ouvrage atteignait 800 mètres de large et s'élevait à 61 mètres de haut. Il multiplia par 6 la production électrique de l'Union Soviétique.
Le DnieproGes en construction :
Le barrage de nos jours:
Pourtant il ne profita guère à l'économie soviétique. L’énorme usine fut partiellement détruite par les troupes soviétiques qui refluèrent en 1941 face à la Wermacht, pratiquant la politique de la "terre brulée".
Apres Zaporo'je le fleuve infléchit une fois encore sa course, en direction du sud ouest, et s'élargit en de larges méandres marécageux. Il entre alors dans les étendues semi-arides de la grande steppe pontique ou pâturaient les peuples cavaliers antiques, mais devenues terres du Marechal Potemkine au XVIIIe siecle.
Celui-ci déploya d'intenses efforts pour coloniser les terres sous peuplées du sud de l'Ukraine, sur lesquelles l'autorité de la Russie s'étendait un peu plus chaque jour. Le Dniepr lèche les pieds de la ville de Nikopol, cité à haute valeur stratégique: son sous-sol contient de riches gisements de manganèse, une ressources dont l'Allemagne nazie manque cruellement, et dont elle s'empara avec avidité en 1941.
Guère plus loin le Dniepr arrive à Kherson, qui a poussé ici par la volonté de Potemkine. Le militaire russe la baptisa en référence à la célébre Khersonese Taurique, ce célèbre comptoir grec qui se développa en Crimée, sur les rives de la Mer Noire, et d'où les marchands entamaient la remontée de cette immense artère.
Le Dniepr approche de Kherson :
Désormais le Dniepr file sur ses derniers kilomètres. Il s'étale en un immense delta aux multiples bras, qui se joint à l'estuaire du Boug Meridional.
Les méandres du Dniepr au niveau de son estuaire :
Le parcours du fleuve à traversé toutes les époques, et il a relié le monde baltique avec le monde méditerranéen. En un sens, il définit ce qui fait l'âme même du monde slave, trait d'union entre deux pôles de civilisation, entre le Nord et le Sud de l'Europe, entre l'Occident et l'Orient.
1943 :
Dans notre campagne, le Dniepr est un fleuve majeur. A ce titre c'est un obstacle que l'Armée Rouge ne peut aborder avec désinvolture. Impossible de franchir d'un bond cette coupure. Une unité ne peut le franchir que si elle a débuté son tour adjacente au fleuve, ou en bénéficiant d'un pont de bateau. Celui-ci est mis en place si une unité est adjacente au fleuve.
Encore faut il chasser les défenseurs de la rive Occidentale, où ma Wermacht, affaiblie, s'est retranchée. Un attaquant serait divisé par deux s'il lançait son attaque à travers le fleuve. Le défenseur pourrait par ailleurs être multiplié par 2 si tout les assaillants attaquent à travers un cours d'eau, majeur ou mineur. Pour renforcer encore ma position, je peut compter sur les fortifications érigées le long du Dniepr: celles-ci procurent un décalage d'une colonne en ma faveur des rapports de force, et exposent l'attaquant à l'éventualité de pertes accrues ( une chance sur deux de causer un step de pertes en plus du résultat normal).
Les forts de la région Zaporo'je-Nikopol :
Tenus en réserve depuis quelques tours, l'Armée Rouge pourrait être tentée d'utiliser ses 3 brigades de parachutistes pour venir annuler la présence du fleuve.
Ces brigades cependant, ne peuvent être parachutées qu’adjacente à
une seule unité allemande, or je me suis efforcé de faire en sorte que pas un seul pan de la rive du fleuve se retrouve dans une telle situation. Le Russe tenterait il alors de parachuter ces troupes plus en retrait du Dniepr, sachant qu'elles seraient immobiles pour un tour, et vulnérables à une contre attaque de mes réserves (si j'arrive à en disposer ??).
Le Dniepr, fleuve creuset de l'Histoire, verra t'il bientôt la défaite de l'Occident contre l'Orient, où une victoire des forces germaniques, au demeurant bien éphémère ?