Depuis le retrait du Viet Nam des américains en 1973, la chute de Saïgon en 1975, l'URSS pousse ses pions dans de nombreux pays. Au Cambodge, le Viet Nam met à bas les Khmères Rouges en 1979. La même année, l'URSS envahit l'Afghanistan. L'influence soviétique grandit en Afrique, en Angola en particulier, au Moyen Orient chez les alliés baasistes, en contrepartie du soutien de plus en plus affirmé des USA à Israël.
En Amérique centrale, le Paraguay et l'Equateur tiennent bon, face aux mouvements de guérillas soutenus par Cuba et l'URSS, mais en 1979, Somoza est renversé au Nicaragua. L'administration Reagan y mène une guerre très secrète en faveur des contras...
En Europe, où La France abrite notamment le quartier général des forces de l'Otan à Saint-Germain en Laye, et plusieurs bases aériennes US, les soviétiques ont commencé en 1977 le déploiement de missiles à courte et moyenne portée SS4, SS5 et SS20 en Europe de l'Est. Evidemment, Carter avait laissé faire, mais l'élection de Reagan en 1980, sa dénonciation de "l'Empire du mal" lors d'un discours sur l'état de l'Union et sa rhétorique plus martiale change un peu les choses. Les relations est-ouest se tendent...d'autant que des tensions internes en Tchécoslovaquie et surtout en Pologne émergent. En Pologne, l'intervention directe de l'armée rouge, opportunément en manœuvre aux frontières est évitée de justesse par l'instauration de l'état de siège par le général Jaruselski.
En France, un fort courant pacifiste agite la gauche. C'est le nouveau cheval de bataille de François Mitterrand, autour duquel il entend rassembler, un jour, une majorité. Si au PCF le slogan "Plutôt rouge que mort" a un sens, chez les cousins du "rassemblement socialiste des forces de progrès" dirigé par ledit Mitterrand, ce n'est pas tout à fait pareil...mais pas loin non plus, et "US go home " tient une certaine côte. Il n'est pas sans écho du côté des forces patriotiques et républicaines de Charles Pasqua, d'ailleurs, et deux des poids lourds du gouvernement, Marie-France Garraud et Robert Galley (compagnon de la libération) penchent un peu de ce côté également, au rebours de VGE, Chaban et quelques autres qui assurent régulièrement l’administration Reagan de leur alliance indéfectible.
Mais donc, à côté d'un clivage droite-gauche exacerbé, s'ajoute un clivage OTAN/Pas OTAN, plus transversal.
En janvier 1983, la campagne pour les municipales entre dans le vif du sujet. Elle est enore plus violente que d'habitude. Dans les hauts de Seine, les manches de pioche sont de sortie, Pasqua fait donner ses troupes, vieux barbouzes anti-OAS, SAC, étudiants musclés. Lorsqu'il s'agit de taper sur les trotskistes de la LCR, sur les nervis du service d'ordre de la CGT, les jeunes exaltés de troisième voie ou d'ordre nouveau donnent volontiers un coup de main. D'ailleurs ces derniers se font régulièrement de l'argent de poche en assurant la sécurité des réunions publiques de tout ce qui est à droite du centre.
Le service d'ordre assez particulier du parti de Jean-Marie Le Pen y va de bon cœur également, mais au seul profit de son parti.
La loi de décentralisation qui a fait suite au rapport Deferre donne en effet aux communes de nouvelles compétences, donc de nouvelles occasions de passer des marchés publics, et par contrecoup, la possibilité d'alimenter toute sorte de caisses noires. Le gâteau promet d'être gigantesque, et tout le monde en veut sa part.
Au soir du premier tour, et compte tenu du climat de violence, l'avantage est pour les forces de l'ordre et de la stabilité contre celles du progrès en marche. Paris renouvelle sa confiance à Michel d'Ornano, plusieurs municipalités des Hauts-de-Seine sont prêtes à basculer à droite, et dans plusieurs grandes villes de province, la situation est identique, sauf quelques exceptions, comme Marseille, solidement tenue par Deferre.
Mais dans un certain nombre de ville, la droite ne peut l'emporter qu'avec l'appui d'un nouveau venu: le Front National. Aux législatives, grâce à ces 1,3%, Jean-Marie Le Pen avait obtenu un siège pour lui même (proportionnelle au plus fort reste). Il s'en était servi comme d'une tribune pour réclamer un arrêt de l'immigration: "Je n'ai rien contre les arabes, n'est-ce pas, et d'ailleurs le trésorier de ma fédération des bouches du Rhônes est arabe (NDLR: un fils du Bachaga Boualem, rapatrié en 1962), c'est donc bien la preuve que je ne suis pas raciste, mais tout de même, si je veux aller visiter une Casbah, je préfère que ce soit à Alger plutôt qu'à Dreux, n'est ce pas."
Des alliances locales entre listes de droites et du FN se font, au cas par cas. Evidemment, les anciens de l'OAS évitent les gaullistes dont ils ont assassiné le grand chef en 1962, mais les plus jeunes, face au "danger bolchévique" et à "l'invasion arabe", font causes communes.
De fait, bien plus de villes basculent à droite que ce qui était prévu, dans plusieurs cas en accepatnt des fusions avec des listes du FN;
C'est un certain choc dans l'opinion, mais vite éclipsé par ce qu'il est convenu aujourd'hui d'appeler "l'affaire Mitterrand".
Au lendemain du second tour, celui-ci a quitté Nevers où il a été réélu. Deux jours plus tard, lui et son officier de sécurité sont retrouvés assassinés à Latché, dans les Landes, où il se reposait. La seule autre victime est son labrador, Danièle Mitterrand étant à ces dates en voyage à Cuba.
A suivre...
