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La classe sénatoriale post-empire
Posté : lun. avr. 30, 2012 6:59 pm
par Locke
griffon a écrit :griffon a écrit :Grégoire , Sidoine et d'autres ........... (saint Eloi

)
ne représentent pas le moyen age ni l'aristocratie Mérovingienne
ce sont les derniers rejetons de la classe sénatoriale Romaine
qui survécut plutot bien en Gaule avec la culture qui allait avec
durant les 6 ème et 7 ème siècle avant de disparaitre brutalement ( et mystérieusement ..... ?)
au début du 8ème
( en Italie elle subsista jusqu'au début du 10ème )
apres elle , en Gaule toutefois , plus rien qui mérite le regard ,
la lumière reviendra d' Angleterre , d' Allemagne ( Austrasie d'abord puis surtout de Saxe un siècle plus tard )
et d'Espagne !
ca c'était du quizz de haut niveau !
plus qu'un énième topic sur la fin de l'empire
un débat sur la fin de la classe sénatoriale serait intéressant

Griffon l'a demandé, voici son souhait exaucé
Il m'apparaît logique que la montée en puissance des maires pippinides et arnulfiens ait fini par évincer au profit des ducs et évêques francs le pouvoir de l'ancienne noblesse romaine qui, même si les mérovingiens ne rendait plus les hommages à l'empereur d'Orient depuis la mort de Clovis, avait su se préserver comme force politique et intellectuelle de Francie. J'aurais fixé sa disparition vers la moitié du VIIe siècle, alors que la dernière figure post-romaine d'envergure en la personne de Venance Fortunat (et encore, je ne sais pas si il était d'ancienne noblesse) s'est éteinte voila quelques décennies et que la production culturelle devint quasi-exclusivement réservée aux ecclésiastiques, dont le nombre de francs "pure souche" gonfla conséquemment les rangs.
De même pour la classe sénatoriale italienne, le Sénat semble s'être éteint lors de la première moitié du VIIe siècle et j'ai énormément de mal à faire le lien, faute de sources mais aussi à cause des mouvements incessants des Ostrogoths/Byzantins/Lombards/Francs dans la région, entre l'ancienne classe romaine et les familles faiseuses de papes du Xe

Y aurait-il eu survivance par brassage ? Marginalisation ? Ou bien mystère opaque et insoluble ?
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : lun. avr. 30, 2012 7:31 pm
par Coelio
Certains généalogistes, comme Christian Settipani, ont pas mal travaillé sur la continuité des familles sénatoriales, en essayant de trouver des ponts avec les familles du Moyen-Age (voir par exemple "Continuité gentilice et continuité familiale dans les familles sénatoriales romaines à l'époque impériale").
Ses travaux sont, à ma connaissance, ce qui se fait de mieux à l'heure actuelle (il faut savoir que nous sommes dans un domaine où le manque de sources rend obligatoire une certaine modestie et force à faire des hypothèses, ce que Settipani reconnait).
Il a démontré, de manière plus ou moins certaine, des liens entre les familles du Moyen Age et des familles de l'Antiquité. Son ouvrage le plus connu propose une hypothèse qui relie directement les rois de France à Ramsès II. Il admet lui-même que certains maillons sont plus des thèses que des certitudes mais, pour avoir étudié ce bouquin, je trouve que la plupart de ses liens sont pertinents et surtout utilisent au mieux toutes les données en notre possession actuellement.
Je n'ai malheureusement pas lu le bouquin sur les familles sénatoriales (introuvable ou à des prix vaselinatoires) mais je suis certain que ce serait une bonne réponse à cette question...
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : lun. avr. 30, 2012 7:41 pm
par Coelio
Tiens, et l'exemple qui illustre peut-être le mieux la thèse que je soutiens, à savoir que la "disparition" de la classe sénatoriale romaine n'est qu'une assimilation en quelques générations dans la classe dominante "barbare" (plutot "barbaro-sénatoriale" à mon sens) est que selon les recherches les plus sérieuses sur les ancêtres de Clovis, Clodion le Chevelu est un cousin éloigné d'Aelia Eudoxia, la femme de l'empereur Arcadius. Il serait donc à ce titre cousin issu de germain de l'empereur Théodose II.
Dès le IVe siècle, la mixité des deux "peuplades" me semble donc avérée. Il est donc pour moi tout à fait certain que la classe sénatoriale, après la chute de Rome (tout au moins celle qui survécut aux différentes invasions, car il ne faisait pas bon être un nanti à cette époque là...) s'est tout simplement fondue dans la classe dirigeante en place, jusqu'à en devenir totalement indissociable.
Les intellectuels, et surtout les prélats, des époques mérovingiennes et carolingiennes sont de culture au moins aussi romains que francs. J'ose avancer qu'ils le sont aussi, en bonne partie du moins, de sang.
Edit : Tiens je viens par exemple, pour voir si je ne racontais pas trop n'importe quoi, de jeter un oeil à la liste des ancêtres connus d'Adalbéron de Laon. Pas mal de noms sont clairement romains (au sens large : l'empereur Zénon, par exemple...) et on trouve notamment l'authentique sénateur gallo-romain Tonance Ferréol, apparenté aux Syagrii. Tonance est d'ailleurs un bon exemple de l'idée de mixité puisque sa propre fils, Lucilia de Narbonne, épouse un Ansbert de Therouanne qui pue son barbare chevelu à plein nez

(et qui descendrait d'ailleurs aussi de Clodion le Chevelu).
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : lun. avr. 30, 2012 8:34 pm
par Locke
Effectivement, c'est une question dont la réponse demeurera en grande partie hypothétique, d'autant plus que la gestion des données inclus de devoir trier les actes apocryphes du véritable et Dieu sait à quel point ils pullulent à partir des années post-carolingiennes.
Il est aussi intéressant de constater qu'il y a une résurgence de consuls/sénateurs/ducs/maîtres de milice/autres titres pompeux romains auto-proclamés à la lignée prestigieuse après la disparition des protecteurs caroligiens: Tusculuni, Cresencius, Mancini (descendants supposés de la gens Hostilii), Colonna (des Julio-Claudiens, carrément

) et j'en passe.. D'où le lien prudent à faire avec l'authenticité des sources connues.
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 10:09 am
par Coelio
Les Tusculum et les Colonna (qui sont en fait deux branches de la même famille) semblent à mon sens d'authentiques familles sénatoriales. Cette dynastie des Theophylactes, même si son ascendance n'est pas connue avant le IXe siècle, est clairement une famille sénatoriale avec des racines datant de l'Empire. Et quand on connait l'endogamie dans la classe sénatoriale, il est effectivement tout à fait envisageable, voire même probable, qu'ils aient du sang julio-claudien (mais aussi du sang constantinien, du sang valentinien....).
En revanche, évidemment, je ne crois pas une seconde que ce soit une famille "purement romaine", par opposition au cas d'Adalbéron de Laon, par exemple, où il y a du sang barbare et du sang romain. Même si la famille revendique plus son ascendance romaine, il est tout à fait certains que les ancêtres des Théophylacte ont forcément conclu des alliances avec des Lombards, des Goths, ou autres semi Dothrakis

. Du reste, à partir du moment où on a une généalogie solide d'eux (IX e siècle), ca ne manque pas : Le premier Theophylacte bien connu marie sa fille ainé, Marosie, successivement à Albéric Ier, un lombard, puis avec Guy de Toscane (les Toscane sont d'ascendance bavaroise), puis avec Hugues d'Arles (les Bosonides d'Arles ont du sang grec mais surtout du sang barbare). On ne me fera pas croire que si Marosie copule avec tous les chevelus au IXe siècle, ses ancêtres inconnus ont gardé un sang purement romain....
J'en reviens donc à la même conclusion : une grosse partie de la classe dominante du Haut Moyen-Âge est issue de l'union de l'élite barbare et de la classe sénatoriale. Selon leurs intérêts, certaines familles revendiquent plutot l'une ou l'autre de ces origines, mais au final, le métissage est la règle...
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 10:14 am
par GA_Thrawn
Coelio a écrit :
J'en reviens donc à la même conclusion : une grosse partie de la classe dominante du Haut Moyen-Âge est issue de l'union de l'élite barbare et de la classe sénatoriale. Selon leurs intérêts, certaines familles revendiquent plutot l'une ou l'autre de ces origines, mais au final, le métissage est la règle...
Par les dieux, déjà du métissage

:romaindesouche:
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 10:18 am
par Coelio
Oui mais du métissage entre gens bien comme il faut
Après tout on accepte tout de même relativement bien les métissages issus de l'aristocratie, au hasard, hongroise, encore chez nous (je n'ai en tout cas jamais vu fdesouche le dénoncer

)
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 10:22 am
par GA_Thrawn
Mais comment ces familles sénatoriales ont elles fait pour traverser toute la tumultueuse histoire de Rome?
Parce que si je me souvient bien elles ont été décimées plusieurs fois pendant les guerres civiles non?

Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 10:33 am
par DarthMath
GA_Thrawn a écrit :Mais comment ces familles sénatoriales ont elles fait pour traverser toute la tumultueuse histoire de Rome?
Parce que si je me souvient bien elles ont été décimés plusieurs fois pendant les guerres civiles non?

Il y a finalement assez peu de familles entières qui ont disparu définitivement ... par mariage et/ou adoption, le nom sinon le sang a toujours été plus ou moins transmis ... et puis il y avait toujours au moins un thrawniste dans chaque famille, susceptible de rallier la faction gagnante au cas où et éviter ainsi l'extermination !!
Ensuite, comme l'explique très bien Coelio, pour ce qui est de la survivance des familles sénatoriales au Moyen-Âge, une solide pratique de la mauvaise foi était conseillé pour faire gober la "pureté" du sang romain de l'élite. Le mélange a été la règle dans la classe dirigeante, comme elle l'a été dans la population au cours des grandes invasions.
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 10:36 am
par Coelio
Même les familles les plus exposées ont eu quasiment tout le temps quelques rejetons, notamment des femmes, qui ont survécu et ont perpétué le sang : par exemple, même les Constantinides, qui ont pourtant pris cher, ont eu des descendants, par les enfants du second lit de Constance Chlore, dont provient Julien-Griffon l'Apostat. Ce dernier a des demi soeurs qui, moins exposées que lui, ont eu une descendance.
C'est la même chose pour les Valentinien, et même pour les Julio-Claudiens du reste. J'avais essayé de faire il y a quelques années un arbre le plus complet possible des Julio-Claudiens, et, par les femmes, tu as pas mal de descendants qui ont échappé aux massacres.
Edit : Math a absolument raison. Le nombre de famille qui ont totalement disparu, même par les femmes, est très restreint : une branche d'une famille peut s'éteindre (Constantin le Grand n'a aucun arrière-petit-enfant, par exemple) mais très rarement une famille, sauf accident dynastique vraiment important.
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 10:39 am
par GA_Thrawn
Ha forcément, si vous comptez les femmes pour transmettre le sang...
Bon blague à part c'est interessant cette histoire d'arbre des julio-claudiens, tu les as tracé jusqu’à ou?
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 10:42 am
par Coelio
Faudrait que je remette la main dessus, il doit être dans un carton quelconque...
Je les ai tracé autant que possible, mais forcément ceux qui ont survécu sont les moins exposés donc ceux pour lesquels les sources s'arrêtent le plus vite

. Mais il ne fait aucun doute qu'ils survivent à la fin de la dynastie et qu'ils ne seront pas inquiétés par les dynasties suivantes (ce qui est intéressant d'ailleurs : on surestime souvent l'importance de la notion de dynastie dans l'Empire Romain alors qu'au final le sang ne donne pas vraiment une légitimité suffisamment importante, sinon on peut être certain que Vespasien ou autre aurait fait un joyeux massacre des cousins de Néron, ce qu'il n'a absolument pas cherché à faire. C'est donc qu'ils ne présentaient guère de danger)...
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 10:45 am
par GA_Thrawn
Ca doit dépendre des périodes effectivement. Si l'idée dynastique n'a pas forcément grand sens au Ier et IIeme siècle, au IVeme après la mort de Constantin l'armée "élague" un peu l'arbre familial en massacrant quand même presque tous ses demi-frères et neveux...
Mais j'imagine que c'est lié à la progression d'une conception beaucoup plus monarchique et orientale du pouvoir?
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 12:47 pm
par Coelio
Il y a clairement une évolution à partir du IVe s, et une prise en compte plus importante de l'idée dynastique. On le voit notamment par le fait que les nouveaux empereurs prennent souvent le soin d'épouser une femme apparentée à leur précédesseur, ce qui n'existait pas avant (Vespasien aurait pu faire épouser à ses fils des femmes julio-claudiennes si cela l'avait amusé, mais il ne l'a pas fait).
Par exemple Pétrone Maxime, après avoir assassiné Valentinien III, épouse sa veuve et fait épouser la fille de son prédécesseur à son fils.
Cependant, cela n'est pas quelque chose de particulièrement récurrent alors que, si la légitimité dynastique était véritablement importante, les usurpateurs successifs auraient toujours trouvé une princesse quelconque à épouser. De plus, il est évident que la légitimité dynastique, dans l'esprit des gens, est une légitimité qui commence à émerger, mais qui est subsidiaire : on est princeps parce qu'on est le plus fort, pas parce qu'on se revendique d'une dynastie. Si on se revendique d'une dynastie, c'est peut-être un plus, mais il ne faut surtout pas inverser les choses : on ne devient pas empereur, en ces temps, pour son sang. La base reste clairement la force, le pouvoir militaire. Cela commence un peu à évoluer, notamment sous l'influence grecque : Anthemius, par exemple, se revendique comme un Constantinien, et comme le gendre de l'Empereur d'Orient Marcien. Bien sûr, cela ne suffit pas à le mettre sur le trône, et les légions de Léon Ier restent l'argument déterminant de la prise de pouvoir, mais c'est quand même un début de recherche de légitimité dynastique....
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 12:57 pm
par griffon
il est de mon devoir de m'élever contre cette vision des choses !
(tendance Coelioesque typique d'honorer le prnicipe dynastique partout)
Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 1:26 pm
par GA_Thrawn
Coelio a écrit :
Cependant, cela n'est pas quelque chose de particulièrement récurrent alors que, si la légitimité dynastique était véritablement importante, les usurpateurs successifs auraient toujours trouvé une princesse quelconque à épouser. De plus, il est évident que la légitimité dynastique, dans l'esprit des gens, est une légitimité qui commence à émerger, mais qui est subsidiaire : on est princeps parce qu'on est le plus fort, pas parce qu'on se revendique d'une dynastie.
Je note quand même que dès le IIIème, Heliogabale et Alexandre Sevère seront quand même désignés empereur en partie sur leur nom et parce qu'ils descendent de Carracala et Septime Sevère et alors même que Macrin avait usurpé le trône. Vu qu'Héliogabale a 17 ans quand il prend la pourpre, on peut douter qu'on l'ai désigné uniquement parce qu'il était le plus fort

Re: La classe sénatoriale post-empire
Posté : mar. mai 01, 2012 1:59 pm
par Coelio
GA_Thrawn a écrit :
Je note quand même que dès le IIIème, Heliogabale et Alexandre Sevère seront quand même désignés empereur en partie sur leur nom et parce qu'ils descendent de Carracala et Septime Sevère et alors même que Macrin avait usurpé le trône. Vu qu'Héliogabale a 17 ans quand il prend la pourpre, on peut douter qu'on l'ai désigné uniquement parce qu'il était le plus fort

Et pourtant.... Elagabaal n'est pas grand chose par lui-même mais il ne faut pas oublier chez ces Emesiens dégénérés et partisans de Mme Mad ce sont les femmes qui dirigent. Et sa grand-mère Julia Maesa, de même que sa mère et sa tante, étaient fortes. Du reste, la chute de Macrin est aussi et surtout une révolte militaire de la part de la IIIe Légion. Donc, là encore, une histoire de rapport de force. Après, c'est vrai qu'on commence à voir apparaitre une légitimité dynastique dès ces Sévères. Mais une légitimité tout à fait subsidiaire : Caracalla tombe parce qu'il n'est plus le plus fort, et Macrin prend le pouvoir, au début, sans opposition, malgré une légitimité dynastique inexistante (c'est un chevalier).
L'année suivante, le rapport de force a changé : Macrin n'est plus le plus fort, donc il tombe, et l'héritier dynastique, Diaduménien, est évincé au profit d'Elagabaal, qui a certes la légitimité dynastique des Sévères, mais surtout le rapport de force favorable.
Quelques années après, Elagabaal est moins populaire auprès des légions que son cousin psychorigide Sévère Alexandre, donc, en dépit d'une légitimité dynastique moindre (Alexandre est un cadet par rapport à Elagabaal) c'est le rapport de force qui prime et Alexandre prend le pouvoir.
Et en 235, hop, le rapport de force change et Alexandre, dont la légitimité dynastique est pourtant incontestée, saute au profit de Maximin le Thrace qui est fils d'un Goth et qui n'est donc pas précisément légitime dynastiquement. Ce dernier (et son fils) mourront à son tour lorsqu'ils perdront le rapport de force.
Donc l'idée dynastique n'est pas totalement absente, mais elle est en revanche totalement secondaire....