Coelio a écrit :Ahhhh !
C'est Seleucos qui vient au chevet d'Antiochos, son fils, amoureux de sa belle-mère, qui est la fille de Demetrios Poliorcète, et dont le nom m'échappe ?

Notre Coelio ne lit pas que son missel, mais il connait son Plutarque, que je ne résiste pas au plaisir de citer intégralement :
"Après un si brillant succès, il (Démétrios) apprend que Ptolémée a libéré ses enfants et sa mère en les comblant de présents et d'honneurs. Il apprend aussi que sa fille, mariée à Séleucos, vient d'épouser Antiochos, fils de ce roi, et qu'elle a été proclamée reine des barbares du haut pays . Voici, à ce qu'il paraît, ce qui s'était passé. Antiochos s'était épris de Stratonice, qui était jeune, mais qui avait déjà un enfant de Séleucos. Il était très malheureux et faisait de grands efforts pour dominer sa passion. Finalement, se condamnant lui-même pour ce désir criminel et voyant que son mal était incurable et sa raison vaincue, il cherchait un moyen pour en finir avec la vie et s'éteindre tranquillement, en négligeant le soin de son corps et s'abstenant de nourriture sous le prétexte d'une maladie quelconque. Érasistrate, son médecin, s'aperçut aisément qu'il était amoureux, mais, comme il était difficile de savoir de qui, il passait tout son temps dans la chambre du malade afin de découvrir son secret ; s'il voyait entrer quelque garçon ou quelque femme à la fleur de l'âge, il observait le visage d'Antiochos et examinait les réactions des parties du corps qui sont le plus affectées par les émotions de l'âme. Or, il n'apercevait aucun changement quand d'autres personnes se présentaient, mais lorsque Stratonice, fréquemment, lui rendait visite, soit seule, soit avec Séleucos, il voyait sur le jeune homme tous les symptômes décrits par Sapho : perte de la voix, rougeurs enflammées, obscurcissement de la vue, sueurs soudaines, désordre et trouble du pouls, et à la fin, quand l'âme est entièrement abattue, détresse, stupeur et pâleur. En outre Érasistrate pensa avec vraisemblance que l'amour d'une autre femme n'aurait pas amené le fils du roi à persévérer, dans son silence jusqu'à la mort. Mais il jugeait difficile de parler et de révéler ce secret cependant, confiant dans l'affection de Séleucos pour son fils, il finit par se risquer et dit que la maladie du jeune homme était l'amour, mais un amour impossible et sans remède. " Comment, sans remède ? " s'écria Séleucos stupéfait. Oui, par Zeus, répondit Érasistrate, parce que c'est de ma femme qu'il est épris. "
" Eh bien, Érasistrate, reprit Séleucos, toi qui es son ami, ne céderais-tu pas ta femme à mon fils, et cela quand tu vois que c'est notre seule planche de salut ? " " Mais toi-même, qui es son père, tu ne l'aurais pas fait si Antiochos avait désiré Stratonice. " " Ah ! mon ami, s'écria Séleucos, plaise au ciel qu'un dieu ou un homme puisse bien vite changer sa passion et la tourner de ce côté, car il serait beau pour moi de renoncer même à la royauté par amour pour Antiochos. " Séleucos prononça ces mots avec tant d'émotion et en versant des larmes si abondantes qu'Érasistrate lui prit la main en disant : " Tu n'en pas besoin d'Érasistrate étant père, mari et roi, tu es, du même coup, le meilleur médecin pour ta maison. " Là-dessus, Séleucos, réunissant une assemblée générale, déclara son intention et sa volonté de proclamer Antiochos roi et Stratonice reine de tous les hauts pays, en les mariant ensemble. " Je pense, ajouta-t-il, que mon fils, accoutumé à m'écouter et à m'obéir en tout, ne fera aucune objection à ce mariage, et, si ma femme répugne à cette union contraire à l'usage, je prie mes amis de lui faire comprendre et de la persuader qu'elle doit trouver beau, juste et utile ce que le roi estime tel. " Voilà, dit-on, quel fut le motif du mariage d'Antiochos et de Stratonice."
(Démétrios, traduction du grec ancien de Robert Flecelière et d'Emile Chambry, Editions les Belles Lettres, p. 60, paragraphe 68.).
Notons que Plutarque, qui écrit quatre siècle environ après les faits, utilise plein de circonlocutions pour raconter sa belle histoire d'amour, bien digne d'ailleurs de la littérature hellénistique trés prisée par les romains, puisqu'elle fournit le sujet de nombre des oeuvres d'art que nous connaissons. Même lui n'y croit pas vraiment.
Les historiens actuels ont une hypothèse plus politique : Sleucos Nicator ("Vainqueur"), le fondateur de la dynastie, a pressenti les deux dangers majeurs qui menacent ses successeurs : la trop grande étendue de l'empire, des Indes jusqu'à l'Hellespont, et le risque d'affrontement au moment des successions.
Il décide donc de nommer son fils Antiochos Sôter ("Sauveur") roi en lui attribuant le gouvernement des satrapies supérieures.
D'autre part, Seleucos, qui a eu cet Antiochos avec Apama, l'épouse perse que lui avait attribué Alexandre pour les Noces de Suse (il est le seul à avoir conservé cette épouse), s'est remarié avec Stratonice, la fille de Démétrios Poliorcète, dont il recherche l'alliance contre les autres souverains. Mais il sait bien que, si Stratonice a un fils, il y aura guerre de succession. Il résoud donc le problème en remariant Stratonice avec son fils : il garde l'alliance de Démétrius, Stratonice reste reine, Antiochos voit son statut ainsi rehaussé - les enfants de Stratonice seront les siens (quoique on ait déjà vu des enfants déposer leur père

).
A l'attention de jag (qui pourrait s'inquiéter pour Antiochos [on se soutient entre vieillards libidineux], lequel a quand même plus de soixante ans - âge considérable pour l'époque, surtout chez les diadoques, lesquels avaient tendance à mourir jeunes

- ) signalons que les rois de l'époque avaient droit à un nombre illimité de concubines...

Disons aussi que Stratonice, qui était beaucoup plus jeune (je dirais moins de vingt ans) avait eu une fille, nommée Phila, d'Antiochos, qui se trouva donc être la belle soeur de son beau-père dont elle était aussi la demi soeur, la tante de ses demi frères et demi soeurs, la belle soeur de sa mère, etc...
